PLÉNIÈRE INAUGURALE d’EMERGING Valley L’innovation au cœur de la transformation de la relation Afrique-Europe

A l’heure de l’accélération des GAFA et des BATX, le destin numérique de l’Europe se joue également au Sud. Comment inventer une alliance numérique entre l’Europe, la Méditerranée et l’Afrique au service du bien commun ?

Mardi 14 dÉcembre – Jour 2 – Plénière 1  – 9h05 à 9h55 –

Modération par Samir ABDELKRIM, Fondateur d’EMERGING Valley

Panélistes :

  • Slim KHALBOUS – Agence Universitaire de la Francophonie, Recteur

Maria Christina RUSSO – Commission européenne, Directrice de la Coopération Internationale

Roger Félix ADOM – Gouvernement de la République de Côte d’Ivoire, Ministre de l’Economie Numérique, des Télécommunications et de l’Innovation

Zeineb MESSAOUD – The Dot, Managing Director

Erol OK – Institut français, Managing Director

Samir ABDELKRIM – EMERGING Valley, Fondateur

Mise en contexte

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a établi dès 2018 un plan ambitieux de partenariat entre nos deux continents, soulignant que l’Afrique était, pour l’Europe, un continent cousin et qu’il n’y avait pas besoin de charité. Nous voulons construire un partenariat d'égal à égal entre le continent africain et le continent européen pour permettre à l'Afrique de faire face à la croissance démographique : en 2050, le continent comptera plus d’1,5 milliard d’habitants.

Un plan ambitieux Afrique-Europe, pour créer dix millions d’emplois durables

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a établi dès 2018 un plan ambitieux de partenariat entre nos deux continents, soulignant que l’Afrique était, pour l’Europe, un continent cousin et qu’il n’y avait pas besoin de charité. Nous voulons construire un partenariat d’égal à égal entre le continent africain et le continent européen pour permettre à l’Afrique de faire face à la croissance démographique : en 2050, le continent comptera plus d’1,5 milliard d’habitants.

Le plan de Jean-Claude Juncker prévoyait la création de dix millions d’emplois, principalement des emplois durables avec un effort important dans le domaine de la formation et de l’éducation.
Il incluait aussi l’accès à l’électricité, pour que 30 millions d’africains supplémentaires aient accès à l’électricité grâce aux projets d’énergie durable, en plus de l’accès à des réseaux routiers améliorés pour 27 millions d’habitants et l’extension du projet Erasmus pour les étudiants et les chercheurs. La pandémie, qui a entraîné une période d’austérité, n’a malheureusement pas permis à ce plan de se concrétiser intégralement. Il devrait être relancé en 2022 avec la présidence française de l’Union européenne, afin que les promesses se tiennent.

Un Etat ivoirien accompagnateur

En Côte-d’Ivoire, l’État est un État accompagnateur : la base de notre développement est vraiment le secteur privé.Comme la Tunisie, la Côte d’Ivoire finalise aujourd’hui son Startup Act. Les startups sont les ambassadrices de l’innovation, la fierté de l’Afrique.

« L’ambition de l’État ivoirien, c’est d’accompagner le secteur privé afin qu’il puisse créer de la valeur et de l’emploi. Une stratégie a été élaborée pour accélérer la transformation digitale de la Côte d’Ivoire et surtout en faire un hub technologique, en mettant l’accent sur l’innovation, l’entrepreneuriat et l’environnement des affaires. »

R.F. Adom

350 millions d’euros pour 45 projets de recherche et d’innovation

La recherche et l’innovation sont au cœur de la nouvelle stratégie de la Commission européenne envers l’Afrique adoptée en 2020. Sur cette base, un partenariat de coopération a été lancé, permettant de développer une série d’actions. La coopération se poursuit également avec l’Union africaine dans des domaines très importants, notamment la sécurité alimentaire, la nutrition, l’énergie, le changement climatique et l’innovation. Avec l’Afrique subsaharienne enfin, la coopération porte aussi sur la santé, avec des programmes ambitieux tel que celui d’”Horizon-Europe”.

Au niveau européen, une communication très importante a été adoptée le 1er décembre 2021 : “The Global Gateway Communication”, qui définit l’action politique en matière de relations extérieures pour les années à venir.

« L’action transversale pour l’Afrique vise à mobiliser 350 millions d’euros
pour 45 projets de recherche et d’innovation conjoints entre l’Afrique
et l’Union européenne. Des actions concrètes doivent rendre
les partenariats en matière d’innovation plus stables et plus durables. »

M.C. Russo

 

Booster l’entrepreneuriat féminin

L’Afrique compte 1,3 milliard d’habitants, dont 60 % ont moins de 30 ans. L’Afrique, c’est l’avenir, le futur. Elle fait naître les startups, elle révolutionne la transformation digitale et cette force digitale va transformer l’Afrique de la manière la plus rapide et la plus efficiente possible.

En Afrique, les femmes sont très fortes : elles participent à la vie sociale, économique et politique. Il convient de leur laisser plus de place, de les intégrer dans les conseils d’administration des grandes entreprises, dans les ministères. En Tunisie aujourd’hui, seulement 4 % des startups sont lancées par des femmes. La société doit aider les femmes à se positionner. Pour cela nous avons besoin de l’Europe : pour les capitaux et pour l’expertise. Nous apporterons notre jeunesse, notre énergie.
La loi StartUp Act favorise l’émergence des startups tunisiennes

The Dot est un projet d’avant-garde destiné à renforcer les synergies au sein de l’écosystème tech tunisien. Il y a dix ans, il n’y avait pas beaucoup de startups ou d’entreprises portées par des jeunes entreprises innovantes en Tunisie. En 2013, le premier coworking space, Cogite, est né à Tunis. Il a été l’initiateur de tout un système et d’une première communauté, jusqu’à inspirer le Startup Act. Lancé en 2019, ce dernier constitue une réelle révolution pour les startups tunisiennes. Cette loi donne de la flexibilité aux jeunes entrepreneurs notamment en termes de change. Une loi construite avec l’État et par des jeunes, par un écosystème naissant, par des structures d’accompagnement.

Cinq ans après, la Tunisie dispose d’un fonds de fonds qui a déjà levé 70 millions d’euros et ambitionne de lever 200 millions d’euros. Startup Tunisia porte la stratégie nationale, accompagnant et finançant les structures d’accompagnement. Un peu plus de 600 startups, dont 30 % portées par des femmes, ont été labellisées.

The Dot est un partenariat public-privé qui part du principe que tous les grands écosystèmes se sont construits autour de lieux. Il rassemble le ministère des Technologies de l’information en Tunisie, soutenu par l’Union européenne et Expertise France, la GIZ et la Fondation Tunisie pour le développement.

« The Dot travaille sur trois axes : un axe entrepreneurial innovant, un axe entrepreneurial des régions et un axe de transformation digitale. Le projet rassemble universités, gouvernement, structures d’accompagnement, ONG, incubateurs et accélérateurs sur 29 000 mètres carrés dans le plus grand centre de Tunis, soit tout un écosystème. Il s’agit d’un projet pionnier sur le continent africain. »

Z. Messaoud

Valoriser les opportunités portées par la langue française

Des projets très innovants ont été lancés, comme le statut d’étudiant entrepreneur, lancé sous forme de pilote en Tunisie, au Maroc et au Liban. Un accompagnement extraordinaire qui augmente les chances de sortir de l’université avec un diplôme, mais également avec un projet professionnel bien pensé. L’AUF va créer, d’ici la fin de 2022, 70 centres d’employabilité francophones dans le monde, dont une quarantaine en Afrique, pour accompagner les étudiants avant avant l’obtention de leur diplôme. Des experts et des coachs sélectionneront les profils d’entrepreneurs pour les présenter aux incubateurs, augmentant ainsi le taux de réussite.

Dans le cadre de la crise sanitaire Covid-19, l’AUF a lancé deux appels à projet, permettant le financement de 150 projets, pour un montant de 2,5 millions d’euros : un premier qui ciblait les équipements de lutte contre la Covid-19, tels que des masques imprimés en 3D ou des gels hydro alcooliques, tandis que le second concernait les outils d’aide à la décision par les nouvelles technologies. Au Sénégal, un projet a porté sur la recherche de marqueurs biologiques du génome. Ailleurs en Tunisie, des chercheurs ont développé des robots de télémédecine. Des projets qui placent la technologie, mais aussi l’humain, au centre.

L’Agence universitaire de la francophonie (AUF) s’intéresse au domaine éducatif et universitaire et à la jeunesse. La place du français dans le monde fait aujourd’hui l’objet d’un constat mitigé. Démographiquement, le français se développe d’une façon incroyable : il s’agira de l’une des langues les plus pratiquées dans le monde dans les prochaines années. Cependant, le français semble générer moins d’opportunités que précédemment, en raison des orientations prises par certains pays au niveau de leur système éducatif et universitaire, mais aussi de la perception du français comme langue internationale. L’Agence universitaire de la Francophonie défend le plurilinguisme, car la diversité culturelle fait aussi partie de l’ADN de la francophonie. Nous devons mettre en exergue toutes les opportunités de la langue française pour la jeunesse : à l’université, dans les recherches, pour faire une grande carrière professionnelle et notamment dans l’entrepreneuriat.
L’AUF a en effet aujourd’hui une vraie ambition entrepreneuriale. Cette agence qui existe depuis 60 ans a beaucoup évolué dans le temps. Au départ, elle était centrée sur l’université. Petit à petit, avec l’évolution du monde, elle s’est ouverte d’abord sur le système scolaire de base secondaire et primaire, puis sur les formations professionnelles, l’employabilité, l’entrepreneuriat et l’insertion professionnelle. Parmi les 1 000 universités et centres de recherche des 120 pays qui adhèrent à l’AUF, premier réseau universitaire du monde, 700 se situent sur les continents africains et européens.

L’AUF structure des centres d’employabilité francophones

 « L’entrepreneuriat est devenu un sujet fondamental pour l’Agence universitaire de la francophonie, l’un des cinq axes du développement de la stratégie de 2021 à 2025. Des concours sont organisés pour défendre le développement inclusif ou encore la place des femmes dans l’entrepreneuriat. »

S. Khalbous

Safir favorise le développement de l’entrepreneuriat et des change makers

Safir est un programme ambitieux en faveur de la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et de l’inclusion économique de la jeunesse, déployé dans neuf pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. La démarche a débuté en 2012 avec un premier projet pilote qui a rencontré un succès phénoménal : le SafirLab, qui a permis l’émergence d’une nouvelle génération de jeunes change makers. Au départ, le projet porté par l’Institut français visait à faire confiance aux sociétés civiles pour favoriser le changement. La Commission européenne a rendu possible un changement d’échelle. Le programme Safir bénéficie aujourd’hui à près d’un millier de jeunes d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, dans 9 pays et sur 4 ans, avec près de 7 M€ de financements.

Des dizaines d’ateliers de sensibilisation aux objectifs de développement durable ou de renforcement des compétences sont en cours et bientôt, plus de 90 projets seront accompagnés, incubés et pour une grande partie d’entre eux, accélérés. Ils devraient faire la différence dans un contexte de crise sanitaire et économique important.
Safir, c’est aussi la création d’un réseau durable, unique en son genre en faveur des ODD. Les talents sont déjà là, et l’objectif est donc de travailler avec des talents locaux. Des success stories qui pourront certainement être présentées dès le prochain sommet EMERGING Valley.

La saison Africa2020 a réuni près de 4 000 personnes autour de 1 500 événements

Autre sujet important pour l’Institut français, la saison Africa2020. Malgré la pandémie Covid-19, plus de 1 500 événements ont pu se tenir, en présentiel ou à distance, réunissant près de 4 000 personnes. Les actions ont porté sur les arts, les sciences, la tech, l’entrepreneuriat, l’innovation ou encore l’économie afin de montrer toute la créativité du continent africain et de changer le regard global porté, en France, sur l’Afrique et ses diasporas. Elle a constitué une réussite, et doit maintenant se poursuivre avec des actions très concrètes, dans la lignée du nouvel agenda fixé par le sommet Afrique/France en octobre dernier.

La Saison Africa2020 confirme l’importance de faire confiance aux sociétés civiles pour porter le changement et l’innovation. L’objectif est de capitaliser sur cette saison pour poursuivre les dynamiques d’émancipation et d’automatisation. L’agenda est triple : le premier axe est l’automatisation des jeunesses et de l’engagement citoyen, le second concerne la professionnalisation et la coopération entre les acteurs et enfin, le dialogue, pour dissiper les malentendus et faire émerger des voix francophones.

« Safir soutient des projets portés par des jeunes, qui eux-mêmes trouvent des solutions pour répondre aux grands défis des sociétés d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient : qu’il s’agisse de sensibiliser les populations à leurs droits, de valoriser le patrimoine ou de protéger la liberté d’expression des minorités. »

 

E. Ok

Synthèse

L’Afrique représente 1,3 milliard d’individus, dont 60 % ont moins de 30 ans. L’entrepreneuriat constitue l’une des clefs du développement de l’Afrique. La recherche, l'innovation et le soutien à l’entrepreneuriat innovant sont aujourd’hui au cœur de nombreux programmes, de la Commission européenne à l’Institut français ou l’Agence universitaire de la francophonie, en passant par l’action de gouvernements engagés tels que celui de Côte d’Ivoire, et celle d’acteurs locaux de référence comme The Dot. Un entrepreneuriat qui doit aujourd’hui mûrir pour être plus social, inclusif et laisser davantage de place aux femmes et à la jeunesse.

à retenir

La Commission européenne a établi un plan ambitieux entre l’Afrique et l’Europe autour de quatre axes principaux : les investissements stratégiques et la création d’emplois ; les investissements dans l’éducation et la mise en adéquation des compétences et des emplois ; l’environnement des entreprises ; l’intégration économique et les échanges commerciaux.
En 2019, le Startup Act tunisien a offert aux startups une flexibilité efficace. Un Startup Act devrait se concrétiser prochainement en Côte d’Ivoire.
L’entrepreneuriat est un axe fondamental de l’Agence universitaire de la francophonie.
Programme ambitieux en faveur de la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et de l’inclusion économique de la jeunesse dans neuf pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, le projet Safir mise sur les sociétés civiles pour favoriser le changement.

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